Saturday, 10 December 2011

Le sens de la marche méditative


J'ai écrit ce petit texte en collaboration avec Gérard Laverdure et après notre marche méditative aujourd'hui.

     Depuis le 19 novembre, chaque samedi, vers midi, plusieurs personnes se réunissent autour de La Place du Peuple (Square Victoria) à Montréal pour amorcer une marche méditative en silence pour la paix. Cette marche se réalise quelques minutes avant l’assemblée générale du mouvement des Indigné(e)s et se voit comme un effort de créer une ambiance de non-violence, d’écoute et de respect pour l’assemblée et pour tout le mouvement. Notre présence silencieuse et déterminée démontre à nos concitoyens l’enracinement spirituel de l’indignation, de la soif de justice, d’intégrité, de dignité et de paix. Protester contre les injustices et s’engager à changer le désordre social est une démarche profondément spirituelle. La pratique de marcher en silence a une longue histoire qui se retrouve dans plusieurs contextes. Chacune de ces références peut nous aider à comprendre mieux le sens de notre marche méditative.
     Commençons en rappelant que les moines et les moniales ont une longue pratique de marcher lentement en file pendant qu’ils prient ou méditent. Ceux et celles qui ont vécu la vie monastique avant 1960 se souviendront de ces marches «à la file indienne» à la fin de l’après-midi pour prier le rosaire. Il y a quelque chose dans la marche même qui aide à la concentration, à une meilleure présence consciente au moment de prière.
     Ce sont les bouddhistes qui ont d’avantage analysé cette expérience. Thich Nhat Hanh a écrit un beau petit livre, entre autres, qui s’appelle La Sérénité de l'instant. Paix et joie à chaque pas. Il fait appel à la marche de pleine conscience. On marche lentement, prêtant attention à chaque étape du mouvement. Ce n’est pas un moment pour oublier rien de la réalité intérieure ou extérieure sinon plutôt pour s’ouvrir à sa plénitude – la plénitude du moment présent. Le passé n’existe pas, le futur n’existe pas. Nous vivons le moment présent dans la plénitude de tout son contexte intérieur et extérieur. En arrivant à cette pleine conscience, la compassion surgit dans notre cœur et nous invite à découvrir comment répondre à ce moment précieux qui nous est donné. La pratique de la marche en pleine conscience devient un apprentissage pour vivre présent au moment actuel pendant toute notre vie, toujours en pleine ouverture à la réalité et aussi pleinement à l’écoute, ouvert à la compassion et prêt à agir avec compassion, c’est-à-dire de façon non-violent.
     Quand on se tourne vers les Écritures chrétiennes, on trouve que le mot le plus fréquemment utilisé pour caractériser les disciples de Jésus, c’est le mot : vigilant. Très souvent Jésus invite ses disciples à être vigilants, attentifs au moment présent. C’est dans ce moment présent qu’il nous invite à y trouver le Royaume de son Père, thème principal de sa prédication. Le Royaume de Dieu n’est pas dans le passé, ni dans le future. Il ne faut pas aller loin pour la trouver parce que c’est en nous et entre nous qu’il se déploie, se construit. Il est toujours présent parmi nous. Qui n’est pas attentif, manquera le moment du Royaume de Dieu, manquera l’arrivée de la plénitude.
     Les Anishnabe, peuple autochtone de notre région, voient leur histoire comme une longue marche ver l’ouest. Pour pouvoir continuer la marche et pour ne pas mourir, il y a des gens chez eux qui sont désigné des porteurs du feu. Le feu est absolument nécessaire pour la survie du peuple. Donc les porteurs du feu ont une responsabilité énorme pour s’assurer que le peuple arrivera au bout de sa marche. Nous retrouvons aussi ce concept chez les Juifs et les Chrétiens : la Terre promise. Terre atteinte au bout de la traversée solidaire d’un long désert.
     Peut-être ces petits références vous aideront à trouver le sens de notre petite activité chaque samedi midi à la Place du Peuple en préparation pour l’assemblée générale – surtout pour un mouvement qui se déclare formellement non-violent et qui annonce, en citant Gandhi, qu’il faut être le changement qu’on veut engendrer.   

Monday, 5 December 2011

Returning the Gaze

     In my last entry I spoke of returning the gaze of those who find themselves in situations of exclusion or oppression. That profound gazing into the eyes (and heart) of the excluded is a wake-up call to discover the profound dimensions of our human existence, what I would call the divine dimension since in fact it is a bottomless well from which one can draw enormous strength and meaning.

      There is however also another and very classic version of the theme of “returning the gaze” that is perhaps even more important. Years ago, when I visited Chiapas, that largely indigenous State in southern Mexico with its long, long history of colonization, the indigenous people always looked down when addressing or being addressed by non-native people. Looking up would have been interpreted as insolence. Part of the pastoral work in the diocese at that time included that of insisting that the indigenous people look directly into the eyes of the non-natives who addressed them.  That included the foreign priests and nuns. In some way one could say that this simple change was part of the origin of the Zapatista movement. That the oppressed and excluded return the gaze of the oppressor is an important gesture, one that speaks loudly and clearly of their dignity, the respect they deserve, the equality they claim. Returning the gaze is in fact a challenge, the insolence of asking for transformation in the heart and in the relationship between oppressed and oppressor. Returning the gaze is a way of demanding that the oppressor “look” deeper.
   A Buddhist riddle asks when one would be able to determine the difference between night and the coming of daylight. After several attempts by the disciples, the master finally suggests that it is when one can recognise that the other is one’s sister or brother. It is then that the day has some.